En 1931, année de l’exposition coloniale au bois de Vincennes, le réseau du métro s’étend. Les lignes 8 et 9 sont prolongées passant ainsi sous le Boulevard Saint Martin dont voici une gravure d’époque.

Construite entre 1927 et 1931 par l’architecte Fulgence Bienvenüe, la station Saint Martin fut fermée le 2 septembre 1939, au début de la Seconde Guerre mondiale. Elle fut réouverte à la Libération, puis rattachée à la station de métro ‘République’, dont elle n’est séparée que de 100 mètre. Sa fermeture définitive est actée en 1967 sur décision du Syndicat des Transports Parisiens.

La station St-Martin devient la plus grande des onze stations ‘Fantôme’ du réseau parisien puisque deux lignes superposées la traverse encore. La ligne 8 étant au dessus de la ligne 9. 4 quais indépendants longs chacun de 105m éclairés par quelques veilleuses et ouverts par ces tunnels à des visiteurs occasionnels munis d’aérosols pour se réapproprier les surfaces qui s’offraient à eux sous formes de tagues et de graffitis. De plus la station est encore visitée par les métros en circulation même s’il y a plus de point d’arrêt. En faisant cette visite impromptue à bord d’une rame de métro, il faut se montrer vigilant pour devinez en quelques secondes et dans l’obscurité la présence d’une station ‘fantôme’. Presque personnes ne la remarque et n’y prête attention sauf quand on connait sa présence. Les stations fantômes intriguent les gens et mystifient le métro parisien.

Les 2 quais des lignes 8 et 9 sont symétriques entre eux. Ils sont indépendants et reliés par un jeu de lucarnes à travers le mur d’axe les séparant. Ce qui permet la ventilation entre les quais et une vue discrète du quai opposé.

Par contre les quais des Lignes 8 sont différents des quais de la Ligne 9. Sur la ligne 8, et sur plusieurs stations voisines, les quais sont voutés, et recouverts intégralement de faïence de Gien usée par le temps et le vandalisme.

Les encadrements des panneaux publicitaire de part leur taille imposante, soulignent grâce à leurs contours la courbe elliptique de la voûte.

Quand aux quais de la ligne 9, la hauteur sous plafond est considérablement réduite par le jeu de linteaux qui le compose et qui le rythme sur toute sa longueur, en lui donnant l’impression d’un parking, une zone industrielle en friche. Dans cet espace totalement tagué, il était intéressant de pouvoir s’en servir comme espace artistique culturel, un espace réservé, ne devant pas trop craindre le vandalisme, sous formes d’installations artistiques dont seuls les voyageurs du métro seraient témoins. On peut facilement imaginer que des fresques seraient réalisées régulièrement, ou bien encore imaginer une mise en scène son et lumière sur le passage du métro, comme ce qui avait été fait pour l’exposition à la station Croix Rouge. Avec une ouverture sur l’utilisation de la vidéo et de la projection.

Quand aux ambiances sonores, ces grands espaces créent des résonances complexes, et des études y ont déjà été menées, notament par l'école d'architecture de la Vilette à Paris. La perception d’un son à l’intérieur d’un des quais varie selon la position de l’auditeur dans l’espace. L’utilisateur devient lui-même acteur par son déplacement. Chaque utilisateur percevra différemment les sons ce qui peut en faire un outil d’expérimentation unique. On peut donc imaginer qu’un des quais de la ligne 8 sera destiné à une salle d’expérimentation polyvalente et on pourrait y inviter VERTEX qui ont axé leur travail sur l’improvisation de musique électronique sur des systèmes de multi haut-parleurs. Ils ont développé une esthétique ainsi qu’une panoplie de techniques qui les conduisent à la performance dans un cadre d’installation.

Dans une station ouverte, on ressent très nettement le contraste de résonance que l’on perçoit quand on se trouve sur les quais, à attendre avec le son des pas et des voix des autres voyageurs, le son des annonces de la RATP à travers leurs haut parleurs, jusqu'à l’entrée en station d’une rame, le vrombissement qu’il génère, le système d’ouverture des portes à air comprimé et la symbolique sonnerie électronique de la fermeture des portes. Mais quand on se retrouve à l’intérieure d’une rame, l’ambiance sonore est plus calfeutrée, et les portes fermées on se retrouve dans une bulle où l’évasion est le maître mot. Il me semblait donc important de travailler aussi sur les ambiances sonores, le son et la musicalité du projet. J’ai pu rencontrer Guy Guermeur, musicien arrangeur et collaborer avec lui dans la réalisation d’un montage sonore illustrant le projet.

Sur le deuxième quai de la ligne 8, l’endroit me semblait idéal pour y intégrer les cabines de studios. Mais au lieu de chercher à isoler acoustiquement tout le quai et casser se volume impressionnant, pourquoi ne pas se réapproprier une rame de métro, de type MF77 pour la réaménager en plusieurs studios modulables, profitant ainsi de son avantage acoustique et permettant de conserver l’image du métro comme génératrice de sons et d’ondes.

De plus, en correspondant les jeux d’ouvertures entre les deux quais avec les ouvertures des portes automatiques de la rame on peut créer des passages entre les deux espaces. Un espace de création relié à un espace d’expérimentation par des studios réaménagés dans une ancienne rame. L’idée peut être séduisante, restera à étudier en particulier l’aménagement de la rame et de son acoustique.

Les 4 quais ont à leurs extrémités des couloirs et des escaliers pour remonter au niveau des deux halls. L'organisation fonctionnelle des stations repose sur la possibilité d'arriver sur n'importe quel quai dans n'importe quelle direction quel que soit l'accès emprunté. Le voyageur passe d'abord par la salle des billets, choisit sa direction au moment du franchissement de la barrière de contrôle. Au delà, il descend sur le quai. Plusieurs facteurs expliquent la longueur des couloirs : outre la multiplicité des accès, les contraintes d'implantation des tunnels ont conduit à jongler entre l'interdiction de passer sous les immeubles, de composer avec les réseaux déjà présents en souterrain, la profondeur de la station et, pour les stations de correspondance, avec la multiplicité des combinaisons de trajet.

C'est à partir de ce schémas que j'ai ainsi pu réaliser une maquette expressive de la station St Martin, en représentant sous forme de réseau en tuyaux de PVC, les différents espaces, et leur liens, ainsi que les acces. La maquette est dans une boite rectangulaire qui une fois fermée ne laisse rien voir de l'intérieur sauf les quelques accès et tunels.

Fulgence Bienvenüe avait adopté le principe des couloirs pour constituer des "sas de rétention" des voyageurs : visionnaire, prédisant le succès de son œuvre, il avait conclu à la nécessité de couloirs assez longs pour éviter de concentrer les voyageurs sur les quais. Les couloirs favorisent un écoulement plus régulier des voyageurs.

Les deux grands halls en voûte elliptique sont situés à chaque extrémité de la station, dans le prolongement des quais, entre le niveau de la chaussée et le tunnel du métro.

Le plus grand des halls pourrait être réouvert et devenir l’espace de vie de la communauté, un espace favorisant le dialogue, l’échange, la vie culturelle et communautaire. Il peut être intéressant de faire entrer la lumière naturelle dans cet espace, grâce notamment à un système de fibres optiques ou alors d’éclairages artificiels technologiques.

Quand au second hall actuellement aménagé en accueil de jour pour sans abris, il pourrait être sécurisé pour en devenir un lieu de stockage pour le matériel où il faudra retravailler les accès pour le transport du matériel souvent volumineux et lourd, d’autant plus pour une salle de cette superficie. Les accès resteront neutres, l’activité du lieu restera discrète depuis l’extérieure, pour créer une véritable coupure entre le monde extérieure et cet atelier de création underground.

Pour les principaux matériaux utilisés dans la station, il y a bien évidement le « carreau de métro », faïence de Giens de dimension 200mmx100mm, blanche et aux bords biseautés, recouvrant une partie des murs ainsi que les voutes des quais de la ligne 8, si caractéristique du métro de Paris tout comme son sol en bitume noir.

La station fait au total une superficie de plus de 5000m², décomposée par différentes zones que nous explique ce schéma.

J’ai été surpris par la surface totale qui semble impressionnante. Et du coup beaucoup trop vaste pour le programme de réaménagement de la station en un atelier de création underground. Le projet sera donc regroupé sur la surface des deux halls et des quais de la ligne 8 et de ces accès. Pour cela on considérera que la Ligne 8 ne circule plus à l’intérieur de la station et que ses quais seront isolés hermétiquement. Quand à la ligne 9 elle circulera toujours à travers les quais de la station, profitant des quais comme espace d’installation artistique.

De plus il est facilement envisageable de créer des ouvertures verticales entre les deux lignes de métro superposées grâce à des trémies. Le passage d’un métro pourra alors être vu depuis les quais supérieurs de la ligne 8, pouvant ainsi être considéré comme une aléatoire au processus de création de la musique électronique, une variable que l’ont peut prendre en compte, témoins aussi d’un réseau, et d’une activité souterraine.

Un passage de métro fréquent qui redonnera une notion de temps dans cet espace figé mais qui vivra au rythme des métros mais principalement de l’effervescence de ses utilisateurs. Souffrant en silence d’une mort lente. Le temps semble s’y être arrêté, gardant les traces d’un passé révolu comme l’ancien bureau du chef de station,

ou encore les restes de publicité d’époque en céramique réalisé selon le principe d’une concession. A son expiration, le panneau était détruit.


Voici enfin la planche de présentation de l'Etat des Lieux de la station St Martin regroupant toutes les informations.

ainsi que la planche d'Analyse de la station St Martin qui seront présentées à la commission de fin d'étude.